Abstract: |
« Comme frappée par la foudre » (Handelsblatt, 05-11-2009). C’est ainsi que la presse allemande décrit la réaction de la chancelière au brusque revirement de General Motors au sujet d’Opel le 3 novembre 2009. Alors qu’à l’été, la maison-mère d’Opel, au bord du dépôt de bilan, avait décidé de céder sa filiale allemande et que le gouvernement fédéral avait accepté de soutenir cette dernière en attendant que soit réglée la question de sa vente, GM décide brusquement de revenir sur sa décision : Opel n’est plus à vendre. L’affaire semblait pourtant conclue : le conseil d’administration de GM avait donné le 10 septembre son aval à la cession d’Opel au groupe de repreneurs associant le canadien Magna et son partenaire russe Sberbank, et les négociations étaient en cours, y compris avec la Commission européenne qui étudiait le dossier sous l’angle des aides d’Etat (les crédits et garanties accordés par le gouvernement allemand s’élèvent à 4,5 milliards €). Mais dans les premiers jours de novembre, le conseil d’administration de GM, constatant une amélioration de la situation du groupe, décide finalement de faire machine arrière. En Allemagne, gouvernement, patronat, syndicats, observateurs, sont atterrés. Tous s’insurgent contre une stratégie industrielle considérée comme illisible et, pis encore, comme sans foi ni loi. Le jour même de l’annonce du revirement de GM, la chancelière Merkel était à Washington, où elle avait tenu le matin un discours remarqué au Congrès ; elle n’est informée de ce ‘camouflet’ qu’à son retour dans l’avion. L’affaire frise l’incident diplomatique…
Avec un peu de recul, on peut pourtant se demander si le revirement de GM était aussi imprévisible qu’il a été ressenti. Indépendamment de la question du soutien à un groupe industriel en particulier, et de celle de la conformité du projet de sauvetage d’Opel avec le droit communautaire (toutes deux hautement controversées), le dossier GM-Opel ne relèverait-il pas aussi d’un classique malentendu lié à de très fortes différences entre les cultures d’affaires allemande et américaine ? Malgré la globalisation de l’économie, on semble encore sous-estimer l’impact de cette méconnaissance sur les choix stratégiques des parties impliquées… (IB) |